PRESIDENTIELLES 2017

Les candidats passent le grand oral à la CFDT


L’exercice était inédit : Benoit HAMON, François FILLON, Alexis CORBIERE qui représentait Jean-Luc MELENCHON et Emmanuel MACRON ont été auditionnés, jeudi 16 mars, par la Confédération à l’occasion de la restitution de notre enquête « PARLONS TRAVAIL ».

Devant 250 représentants de fédérations et d’Unions Régionales (notre UD était représentée par Raphaël BRETON et Pierre SCARFOGLIERO), chaque candidat a joué le jeu de la vérité, sans occulter les sujets de fâcherie.

Premier intervenant, le candidat HAMON, très à l’aise, a défendu sa taxe sur les robots et son revenu universel d’existence. Il a affirmé, aussi, qu’il fallait renforcer la négociation dans l’entreprise tout en abrogeant la loi EL KHOMRI, conçue, pourtant, dans ce but !!

Il a préconisé une extension des pouvoirs des Comités d’Entreprise afin qu’ils puissent émettre un avis conforme sur l’usage de l’argent public et sur l’organisation du travail et de l’emploi.

Sur la loi Travail, il s’est engagé qu’une concertation ait lieu et que la loi soit le texte concerté. Le candidat FILLON est intervenu ensuite :

Sur le Temps de Travail :

Il a évoqué la fin des 35H.

Il est contre la fixation d’une nouvelle durée légale.

Il proposera, aux entreprises, de négocier, librement des accords majoritaires, sur le temps de travail.

Cette liberté de négocier ou non, durerait entre un an et 18 mois. Une durée moyenne de référence serait ensuite fixée en fonction des accords signés !!

Il a défendu le principe de suppression de 500 000 postes dans la fonction publique et l’allongement de la durée de travail des fonctionnaires justifiant ces mesures par la nécessité de baisser la dépense publique.

Il a écarté l’idée d’imposer, de manière autoritaire, les règles du dialogue social.

Il a jugé la situation explosive et que cela nécessitait rapidement la prise de décisions stratégiques.

Le candidat MELENCHON n’avait pas envoyé son hologramme mais seulement sont porte parole Alexis CORBIERE.

Celui-ci, après nous avoir avoué que son enfance avait été bercée par la CFDT (son père étant militant de notre organisation), s’est vite réveillé pour « porter la parole de la force du peuple ».

Il a fustigé l’Europe, qui pour son candidat, confisque la souveraineté du peuple et la soumet à la souveraineté de l’argent.

Il parle de faire une révolution citoyenne, si nous ne voulons pas subir de coup d’état ethnique ou financier ?

Il martèle les thèmes de la campagne :

- la nouvelle constitution qui doit être sociale

- la planification écologique

- la sortie de l’OTAN

Il a conclu sur le rassemblement des « insoumis » du 18 mars qui fera que la température politique montera « on essaie de nous imposer le duel MACRON/LE PEN avec une épée dans le dos ».

Le candidat MACRON, en marche à BERLIN, avait posté une vidéo :

Il s’est présenté comme le candidat du travail.

Il veut suspendre le compte pénibilité et engager une vraie négociation par branche pour le mettre en oeuvre de manière adaptée.

Il veut intégrer ce compte dans un nouveau système de retraite universel.

Il admet que si les syndicats sont mal vus c’est du fait qu’on ait mal fait vivre la démocratie sociale. Il a affiché sa foi en une république contractuelle.

« Moi président, a-t-il osé, je suis pour donner moins de poids aux syndicats sur la gestion des grands risques, c’est de la responsabilité de l’Etat et leur redonner beaucoup plus de place dans l’entreprise et dans les branches. Cela devrait changer le visage du syndicalisme !! »

La CFDT étant bien élevée, à l’applaudimètre c’est le candidat FILLON qui a été le moins salué.

A vous de juger maintenant.

 

Le Secrétaire Général

Pierre SCARFOGLIERO

 

PARLONS TRAVAIL... PARLONS TRAVAIL... PARLONS TRAVAIL...

 

Le 16 Mars la CFDT, dans le cadre de la restitution de l’enquête « Parlons Travail », a remis un Manifeste de la CFDT pour le travail (supplément n°3585 - Syndicalisme Hebdo). Mis en ligne sur le site de l’UD CFDT 93 : www.cfdt93.fr

Les 7 grands enseignements de l’enquête

Avec cette enquête d’une ambition et d’une ampleur sans précédent, véritable opération de démocratie directe, la CFDT a voulu redonner la parole aux gens sur leur relation au travail. Plus de 200000 personnes ont répondu à l’enquête, pour un total de 20,4 millions de réponses collectées.

Parlons travail offre une opportunité inédite de connaître les vraies préoccupations des travailleurs, de casser les préjugés et d’inventer de nouvelles solutions. C’est également une chance de remettre le travail au coeur du débat public, à quelques semaines de l’élection présidentielle.

 

1) J’AIME MON TRAVAIL

77% des répondants à l’enquête aiment leur travail.

Plaisir, fierté, épanouissement… Le rapport qu’ont les travailleurs avec leur travail se révèle très positif et c’est tant mieux car le travail prend une grande part dans la vie de chacun et constitue un marqueur d’inclusion sociale fort. Même si 81% des répondants travaillent avant tout pour subvenir à leurs besoins, l’engagement au travail dépasse la contrepartie financière.

D’autres raisons font que nous travaillons, comme le sentiment d’utilité ou les relations humaines que l’on tisse au travail. Le travail s’affirme comme une source d’épanouissement.

38% pensent qu’ils ne pourraient pas être heureux sans travail.

 

2) ENSEMBLE, ON TRAVAILLE MIEUX

69 % des répondants ne sont pas d’accord avec l’affirmation suivante: « Au boulot, soit tu marches sur les autres, soit tu te fais marcher dessus ».

L’enquête révèle que les relations humaines comptent beaucoup pour les travailleurs.

Ils sont 79% à affirmer qu’il suffit d’un collègue sympa pour rendre le travail agréable.

À l’inverse, un collègue pénible peut rendre le travail invivable pour 86% des répondants. Globalement, pour 76% des répondants,les relations avec leurs collègues sont cordiales ou même formidables.

 

3) LE TRAVAIL PEUT ÊTRE DANGEREUX POUR LA SANTÉ

35% des répondants considèrent que leur travail nuit à leur santé, voire même les délabre.

Un quart (28%) seulement des répondants pensent que son travail est favorable à sa santé. Ce sont davantage les classes populaires qui craignent que le travail n’altère leur santé.

Les ouvriers ou employés, ou les personnes gagnant moins de 1 500 euros, sont environ 40% à dire que le travail les délabre.

44% disent ressentir souvent des douleurs physiques à cause de leur travail.

34% des travailleurs dorment mal à cause de leur travail. Les conséquences sur la santé pour ces travailleurs sont significatives et se traduisent par des problèmes de sommeil, des douleurs physiques ou un recours aux médicaments plus fréquent. Pour comprendre cette souffrance et porter des solutions de progrès, l’analyse de Parlons travail a permis de comprendre ce qui construit la relation de chacun au travail.

 

4) TROP DE TRAVAIL TUE LE TRAVAIL

51% des personnes interrogées affirment que leur charge de travail est excessive. Et plus de la moitié (58%) disent ne pas avoir le temps de faire leur travail correctement.

32% disent qu’il leur arrive souvent de travailler en dehors de leurs horaires de travail ou pendant leurs jours de repos.

Les chercheurs ont évalué la « charge de travail » des répondants selon quatre critères :

- pouvoir prendre tous ses congés et RTT (71%), 

- avoir une quantité de travail modérée (47%),

- ne pas se voir fixer des objectifs intenables, ou rarement (78%),

- avoir le temps de faire correctement son travail (42%).

Assez logiquement, l’enquête montre que l’une des causes des problèmes de santé engendrés par le travail est son intensification et sa charge excessive.

 

5) DU MANQUE D’AUTONOMIE AU MAL-ÊTRE AU TRAVAIL

Les résultats de l’enquête sont sans appel : le manque d’autonomie est la seconde source de mal-être au travail. Les travailleurs sont nombreux à réclamer d’avantage de marge de manoeuvre pour organiser leur activité :

74% des répondants préféreraient plus d’autonomie à plus d’encadrement.

Comme pour la charge de travail, les chercheurs ont élaboré un indicateur pour évaluer le degré d’autonomie au travail en recoupant trois critères :

- l’organisation du planning de travail assez en amont pour pouvoir s’organiser (55%),

- l’impression de ne pas être une machine (65%),

- la possibilité de mettre ses propres idées en pratique (54%).

Résultat : seuls 27% des répondants remplissent ces trois critères d’un niveau d’autonomie normal.

Le lien avec la santé est très net : 61% de ceux qui n’ont aucun critère dorment mal à cause de leur travail, contre 15% de ceux qui les remplissent tous. L’écart est plus net encore pour le recours aux médicaments : 17% contre 2%.

Il n’y a pas de bonne qualité de vie au travail sans marge de manoeuvre pour bien faire son travail, dans de bonnes conditions.

Or, qualité de vie au travail et compétitivité sont liées. Pour la CFDT, il ne peut y avoir de développement économique durable sans une économie fondée sur la qualité des biens et des services, produits dans le cadre d’un travail de qualité. Cela passe, entre autres, en faisant appel à l’intelligence collective des travailleurs.

 

6) LE MODE DE MANAGEMENT POINTÉ DU DOIGT

51% des répondants disent ne pas pouvoir compter sur l’aide de leur supérieur.

Une grande majorité estime d’ailleurs que ne pas avoir de manager ne changerait rien à leur travail (62%), voire qu’ils travailleraient mieux sans (25%).

Résultat : lorsqu’ils ne sont pas d’accord avec ce que leur imposent leurs chefs, si 72% des répondants le leur disent, ils sont quand même 88% à choisir d’en faire le moins possible, 16 % à freiner et 6% à tricher.

 

7) AVOIR SON MOT À DIRE SUR LE TRAVAIL ET L’ENTREPRISE

73% des répondants veulent participer davantage aux décisions importantes qui affectent leur entreprise ou administration.

L’enquête révèle que les travailleurs rejettent l’idée d’un monde du travail placé sous le règne de la hiérarchie et du silence. Ce modèle semble bien périmé. Les gens veulent s’exprimer, avoir leur mot à dire, être utile, avoir du sens. Ceux qui souffrent au travail sont ceux qui disent n’avoir aucune liberté pour l’organiser, aucun espace pour s’exprimer, aucun sens à leur activité. Le temps est venu de partager le pouvoir dans l’entreprise et non plus seulement les richesses qu’elle crée. La financiarisation des entreprises a contribué à rendre le travail invisible alors qu’il en est le coeur. C’est pour cette raison que le savoir des salariés est central. Ne pas accepter de faire de l’organisation du travail un objet de dialogue, c’est mettre à distance les aspirations des salariés et in fine, conduire à des formes plus ou moins prononcées de désengagement au travail. Le dialogue social n’est définitivement pas une contrainte mais un facteur de performance économique et sociale.

REVENDIQUER UN TERRITOIRE PLUS ÉQUITABLE


Comment lutter contre les inégalités entre les territoires ? (extrait de LA REVUE)


La mégapole francilienne connaît un véritable paradoxe. La question des services publics et des services au public est essentielle en termes de sécurité et d’égalité entre les territoires.

Depuis une vingtaine d’années, Paris est le seul département francilien qui n’a pas vu sa population augmenter. A contrario, celle de la grande couronne augmente sans cesse depuis plus de trente ans. Sauf que tous les citoyens le savent très bien : les meilleures écoles, les meilleurs hôpitaux, les grands musées sont à Paris. Prenons un autre exemple : comparons les forces de police entre Paris et Évry (91). L’analyse est vite faite: les différences de moyens entre les deux territoires sont considérables.

Si le Grand Paris, dans ses modalités de transport, a pour vocation de réduire les distances entre territoires, il ne résout pas ces problèmes cruciaux pour les citoyens. Dans certains territoires de la mégapole, les sentiments d’inégalité, d’abandon, de stigmatisation changent le regard sur notre sécurité. Sur les dix villes françaises considérées comme les plus pauvres, sept sont franciliennes, et les seize plus riches sont également franciliennes. Une bien plus grande solidarité financière doit exister entre territoires pour permettre un niveau de services et d’équipements comparables.

Pour illustrer ces propos, faisons un focus sur le département de la Seine-Saint-Denis. L’île-de-France est, avec le grand Londres, la première région économique d’Europe. C’est plus du tiers du PIB national, soit un PIB comparable à celui des Pays-Bas. Pour un habitant de la Seine-Saint-Denis, ces quelques données peuvent paraître erronées tant les taux de pauvreté et de précarité sont forts dans ce département. Ce territoire, qui a connu une désindustrialisation presque totale à partir des années 1970, connaît un taux de chômage deux à trois fois plus important que dans les Yvelines ou en Essonne.

Dans les années 1990, la stratégie a été de faire venir des entreprises et des sièges sociaux, stratégie symbolisée par la construction du Stade de France à Saint-Denis, sur des sols pollués d’ailleurs. Au fur et à mesure du temps, cette politique a montré ses limites. L’entreprise qui s’installe sur ce territoire fait travailler des salariés qui habitent dans d’autres départements. Peu d’emplois locaux ont été créés, stigmatisant alors un peu plus encore les populations locales, qui n’ont pas ou ont peu accès à l’emploi. L’effet est ici redoutable, nuit au vivre-ensemble et peut engendrer repli sur soi et insécurité.

Les réponses se trouvent donc ailleurs que dans le transfert d’activité qui se conjugue avec le transfert de salariés. Ce territoire, terre de migration et de jeunesse (22 % de la population a entre 15 et 29 ans), doit être considéré comme un espace d’avenir au sein de la mégapole. Ce n’est malheureusement pas le cas pour l’instant. Un chiffre fait d’ailleurs froid dans le dos : plus d’un jeune sur trois de cette catégorie arrête ses études sans avoir obtenu aucun diplôme qualifiant. Cela paraît inconcevable aujourd’hui dans un monde où, sans formation initiale et sans diplôme, l’avenir professionnel d’un jeune paraît bien compromis.

La question de fond est donc de savoir si ce territoire qui fait office de sas, où les populations arrivent de l’extérieur, s’installent, puis le quittent une fois intégrées dans la société, peut bénéficier du même accès aux droits, tant en termes d’éducation, de santé, de culture que de sécurité. Si les citoyens se sentent bien sur ce territoire, il y aura recul de l’insécurité et du sentiment d’insécurité. Et ce sentiment n’est pas uniquement ressenti par les couches populaires, il touche également et de plus en plus les classes moyennes. La peur du déclassement et l’impression « que l’on en fait plus pour les autres» fragilisent considérablement notre pacte républicain.

On le voit, cela nécessite des choix politiques forts. Ils on été faits en termes d’urbanisme ces dernières années, mais cela n’est pas suffisant. Aux côtés des choix politiques, la société civile, au sein de laquelle se trouvent les organisations syndicales, doit se mobiliser et s’engager dans ces territoires et auprès de ces populations, et avec ces populations. La proximité avec les principaux intéressés est indispensable ! Faisons en sorte qu’ils redeviennent acteurs de leur vie.


Secrétaire Général de l’URI Ile de France

Philippe LENGRAND